Après avoir vu un post sur Facebook concernant la récente campagne contre le harcèlement menée à l’Université de Neuchâtel (UNINE), j’ai pris contact avec l’institution pour en discuter. La problématique me touche et en tant qu’ancienne étudiante, je suis heureuse que mon université se mobilise, parle du problème et agisse!
J’ai donc rencontré Morgane Wüthrich, déléguée au bureau de l’égalité et en charge du projet, pour qu’elle me raconte l’histoire derrière la campagne #UNIUNIE contre le harcèlement lancée en mai 2019. « C’est l’Université de Genève (UNIGE) qui, suite à une étude menée en 2016 par Dre Klea Faniko, démontrant que le sexisme et le harcèlement au sein d’une université ont des conséquences sur les carrières académiques, a décidé de créer une campagne de sensibilisation. Une démarche que nous avons répliqué à Neuchâtel. » En effet, même si les témoignages récoltés (et utilisés pour les visuels) sont spécifiques à Genève, en tant qu’ancienne étudiante, je peux confirmer qu’on les retrouve (malheureusement) ailleurs. « Il n’y a pas eu de vague de dénonciations à l’UNINE, continue-t-elle. Mais effectivement, on est presque sûr·e·s qu’on se retrouve au moins une fois dans l’un des témoignages. »
La preuve: la réaction des étudiant·e·s a été positive!* « On a tout préparé le week-end pour qu’il·elle·s aient la surprise le lundi, m’explique Morgane. Des stands étaient à disposition pour discuter et débattre avec eux·elles et pour qu’il·elle·s découvrent la campagne. On a également placardé les affiches sur les murs et collé au sol les stickers géants avec les divers commentaires et témoignages. » Finalement, un e-mail leur a été envoyé pour les informer du début de la campagne et des mesures concrètes déployées.
*Il·elle·s ont même demandé la création de workshops pour apprendre à mieux réagir. Le corps enseignant a quant à lui souhaité savoir comment éviter ces situations. Des ateliers ont donc été mis en place. Ils ont eu lieu en octobre.
Désormais, les étudiant·e·s ont a disposition deux médiateurs, une adresse e-mail pour signaler les abus, une page sur le site internet de l’Université où se trouvent, entre-autres, les définitions, exemples et conséquences du harcèlement, ainsi qu’un carnet de bord dans lequel on note la date, le lieu, l’auteur. « On a ainsi de réelles preuves le jour où l’on souhaite faire remonter ça plus haut, m’explique Morgane. Il y a aussi une section dédiée aux témoins et au corps enseignant, poursuit-elle. Il est important de les informer et de les sensibiliser, car eux aussi doivent agir. Et souvent, leurs interventions peuvent faire une grande différence. »
Personnellement, je trouve certes honorable, bien que normal, que des institutions comme les universités agissent et réfléchissent sur comment appliquer une politique de tolérance zéro. C’est rassurant de savoir que notre université nous soutient. Et ça nous permet aussi de l’estimer. Les professeur·e·s, directeurs·trices de thèses et autres figures respectées peuvent aussi être lourd·e·s, lancer des regards et des commentaires déplacés et faire des remarques sexistes. Par exemple, lorsque j’ai annoncé que je souhaitais partir au Népal pour ma recherche de terrain, mon directeur de mémoire m’a dit: « Vous savez Alyssa, il faudra vous salir les mains là-bas. » Merci. C’est bien connu, une femme, c’est fragile. Bravo professeur!
L’une des vidéos réalisées pour la campagne. Si tu veux regarder les autres, clic ici.
« On ne peut plus changer le raisonnement de certaines personnes, mais ce n’est pas trop tard pour changer celui des jeunes, me répond Morgane. Le bureau de l’égalité veut continuer à faire vivre cette campagne ! On va tout faire pour que ça dure. » Un projet qui la passionne: « On s’est mis ensemble avec l’UNIGE pour travailler là-dessus. C’est un plaisir de travailler pour des causes et valeurs qui me parlent. J’espère vraiment que d’autres universités suivront et qu’ensemble, on pourra initier un réel changement.» Un bon début de la part d’institutions qui détiennent et transmettent un tel savoir. Car comment se revendiquer comme telles si en leur sein, on continue encore de considérer des personnes inférieures en raison de leur sexe, genre ou orientation sexuelle?